- Laurence Boucher
Automutilation, triste solution pour les migrants…
Dernière mise à jour : 2 juin 2020
Vous comprendrez que le flux de migrants provenant de pays en difficultés est un enjeu planétaire. Par contre, force est de constater que les frontières et routes européennes sont particulièrement touchées par ce défi qu’est l’accueil de ces individus en quête d’un nouveau chez-soi. Plusieurs méthodes sont tentées dans le but d’éviter le contrôle européen. Effectivement, ledit contrôle a pour objectif de découvrir qu’elle fût la frontière d’entrée de ces migrants qui parfois tente de franchir d’autres pays que celui où ils sont entrés. Par contre, une triste pratique reste encore trop peu documentée et commentée, celle de l’automutilation des doigts dans le but d’échapper aux contrôles européens.
Généralement, les migrants se mutileront afin de rendre illisible ou d’effacer leurs empreintes digitales. Les empreintes digitales sont d’une importance capitale pour les autorités européennes. En effet, elles sont stockées dans la base de données Eurodac. Ce système, démarré en 2003 au même moment que le « système Dublin », a comme objectif de déterminer l’État membre de l’Union européenne par lequel est entré le migrant et par ce fait, qui sera responsable d’examiner la demande d’asile de celui-ci. De plus, il a pour objectif d’éviter que le migrant formule une demande d’asile dans plus d’un État membre de l’Union européenne. La conséquence de ce système est que, dans plusieurs des cas, les autorités françaises, par exemple, vont expulser en Italie ou en Grèce des réfugiés qui sont entrés dans ces pays ou même les renvoyer dans leur pays d’origine.
Les méthodes utilisées pour échapper au règlement de Dublin sont diverses. En effet, les migrants se coupent, se brûlent avec de la chaleur ou de l’acide ou se mordent les doigts pour échapper aux autorités européennes. La fâcheuse réalité est que cette blessure doit être très profonde sans quoi les empreintes digitales redeviendront lisibles lors de la guérison. Parfois, certains migrants devront se mutiler de multiple fois pour éviter que leurs empreintes redeviennent lisibles.
La plupart des migrants décident d’infliger à leur corps un tel traitement pour échapper aux bases de données pour deux raisons principales ; éviter d’être renvoyé dans leur pays d’arrivée ou d’origine et pour que les procédures de demande d’asile se fassent plus rapidement. Avec des empreintes illisibles, l’administration européenne considère les individus en situation de fraude et leur demande devra être analysée dans un délai maximum de 15 jours (qui est rarement respecté), mais cette procédure leur donne accès à moins de droit que la procédure ordinaire. En procédure normale, les délais d’analyse de la demande peuvent prendre plus de deux ans ce qui s’avère interminable pour ces individus.
C’est le cas d’Amal, un demandeur d’asile érythréen qui a endommagé ses empreintes en mettant ses doigts dans un cocktail de plastiques fondus. Il dit ne pas vouloir attendre toute sa vie pour avoir une réponse à sa demande d’asile et ainsi se voir accorder le statut de réfugié.
Ce phénomène est un cri de désespoir témoignant d’une détresse inimaginable. Il faut donc se demander si les procédures de demande d’asile sont efficaces et si celles-ci valent l’automutilation des migrants qui sont avant tout des individus comme vous et moi.