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  • Mia Chen Albert

Démocratisons l’accès au droit!

Dernière mise à jour : 2 juin 2020



De nos jours, est-il possible pour la majorité de la population d’avoir accès à des services juridiques décents au Canada?

Voici une question très pertinente qui, selon moi, affecte le quotidien de bon nombre de citoyens et de résidents canadiens. Encore aujourd’hui, plusieurs facteurs contraignants empêchent le commun des mortels d’accéder à une justice lui permettant de faire reconnaître valablement ses droits.

Contrairement à la pensée populaire, l’accès à la justice ne signifie pas seulement l’accessibilité aux tribunaux. En effet, il s’agit, entre autres, d’avoir les outils nécessaires pour entreprendre des démarches efficaces ou d’avoir les connaissances appropriées pour se bâtir un dossier efficient. Nul doute que l’incapacité du justiciable à mettre de l’avant sa cause afin de réclamer justice engendre une certaine méfiance, voire un possible désintéressement vis-à-vis des institutions juridiques qui, pour plusieurs, semblent inatteignables.

Ce problème ne date cependant pas d’hier, causant de nombreux torts à diverses générations. Bien que la démocratie contemporaine suive l’idéologie idyllique selon laquelle tous les citoyens sont égaux et qu’ils ont tous les mêmes chances et opportunités, la réalité est tout autre chose. Le système juridique avantage les plus fortunés au détriment de ceux possédant moins de moyens financiers. Aujourd’hui, l’engorgement des tribunaux, les frais d’honoraires des représentants et le manque d’encadrement et d’informations sur les procédures à suivre pour faire valoir ses droits sont trois facteurs parmi d’autres qui retardent les différents processus du système judiciaire au Canada. Un procès s’échelonnant sur plusieurs mois, par exemple, peut engendrer des coûts se chiffrant en centaines de milliers de dollars, somme dont dispose peu de gens.

Toutefois, on essaie de remédier à cette situation inacceptable depuis les dernières décennies. À travers le monde, on a vu apparaître trois grandes vagues de changements dans le but de rendre plus accessible le système juridique. Selon les auteurs Cappelletti et Garth, le premier mouvement serait survenu peu de temps après la Seconde Guerre mondiale avec l’arrivée de l’aide juridique. Celle-ci consiste à apporter une assistance, ainsi que des services de représentation, aux populations les plus désavantagées au niveau financier. Le deuxième mouvement a fait son apparition suite à l’intérêt croissant quant aux droits collectifs. Ainsi, de plus en plus de litiges se sont portés sur des problèmes systémiques d’inégalités.

Finalement, dans ce que l’on considère comme le troisième mouvement, on assiste présentement à une redirection des solutions pour régler les différends. À cet égard, il est de plus en plus conseillé, pour résoudre certains conflits, de se tourner vers des alternatives comme la médiation et la conciliation plutôt que vers le recours litigieux. Par cette nouvelle approche, l’objectif est de simplifier le système juridique, ainsi que de faciliter l’accès à la justice pour tous.

Au Canada, c’est seulement à partir des années 70 que des programmes ont été mis en place par le gouvernement pour tenter de remédier aux problèmes observés quant à la difficulté d’accès à la justice. Bien qu’innovateurs dans la diffusion de renseignements sur le domaine du droit, ces programmes ne permettaient pas de résoudre les conflits qui étaient, de par leur nature, chargés de jargon juridique et, essentiellement, trop compliqués pour les justiciables qui n’avaient que des connaissances très rudimentaires sur les sujets en question.

Il a donc fallu, après maintes constatations des lacunes du système juridique canadien, adapter et redéfinir ce en quoi consiste l’accès à la justice. Dorénavant, il est primordial de considérer les facteurs sociaux, économiques et psychologiques lorsqu’on en vient à l’application de la loi et de penser au-delà des tribunaux et des procédures traditionnelles. D’ailleurs, une nouvelle approche semble plaire aux justiciables, soit la participation. Celle-ci permet de mettre à l’écart le processus juridique désuet et de positionner la résolution des différends de manière à la rendre plus atteignable pour les gens en tenant compte de leur réalité contemporaine.

Notamment, dans l’arrêt Hryniak c. Mauldin, la juge Karakatsanis, de la Cour suprême du Canada, déclarait en 2014 que l’on :

« reconnaît de plus en plus qu’un virage culturel s’impose afin de créer un environnement favorable à l’accès expéditif et abordable au système de justice civile. Ce virage implique que l’on simplifie les procédures préalables au procès et que l’on insiste moins sur la tenue d’un procès conventionnel et plus sur des procédures proportionnées et adaptées aux besoins de chaque affaire. » (para 2).

Ainsi, avec l’entrée en vigueur du nouveau Code de procédure civile en 2016, on a pu assister à des changements majeurs dans la manière de gérer la résolution des différends. Effectivement, avec son article premier qui oblige les parties à considérer le recours aux modes privés de prévention et de règlement des différends avant de s’adresser aux tribunaux, il est évident que le législateur souhaite faire évoluer la situation quant à l’accès à la justice au Québec. Les nouvelles mesures prises pour moderniser la justice avec l’utilisation accrue de moyens technologiques sont d’autres initiatives mises en place pour tenter d’améliorer le système juridique et de désamorcer l’engorgement problématique des tribunaux.

Cependant, est-ce suffisant? Bien que tous ces changements présagent un virement de situation, il n’en reste pas moins que ceux-ci ne se feront pas du jour au lendemain. Il est primordial de donner un accès à la justice aussi universel que possible à un maximum de personnes afin d’acquérir un système juridique représentatif de la population. Comment mieux atteindre cet objectif autrement que par la participation active des justiciables au sein du recours? Cette initiative leur permettra de reprendre confiance en la justice et en l’État. Démocratisons l’accès au droit!

Caricature tirée du blog Centre Social Protestant Vaud (source en ligne : http://www.francoismaret.ch/dotclear/index.php?2011/06/29/847-acces-a-la-justice)


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